en boucle...
Plus d'un mois que je n'ai rien posé de personnel ici. Juste deux textes de fiction, histoire de garder un contact avec les mots...
Difficile des les apprivoiser, ces mots. Pourtant, j'en ai. Je les sens se bousculer au portillon, ils ont envie de courir ventre à terre vers des yeux, des cerveaux prêts à les aimer, je sais bien. Mais en même temps, ils m'échappent. Ils sont incontrôlables, ils ne se laissent pas faire.
Ils font un boucan du diable, sous ma caboche, et ils me saoulent de silence hurlant. Pour l'instant, j'ai juste réussi, au prix d'un effort intense, à les poser sur un papier. Mais ils ne peuvent pas franchir la barrière du clavier. Parce qu'ils savent, les cochons, comme mon papier ne sait pas les garder... à peine jetés, ils s'enfuient, roulent en boule vers la première poubelle qui passe. Je les y lance d'ailleurs avec plaisir, la plupart du temps, soyons franche.
Pourtant, j'ai ENVIE d'écrire.
Ecrire quoi ? Oué, ben une chose à la fois, hein... Je sais pas "quoi". Je sais juste que j'ai envie, c'est déjà bien.
Alors, ce soir, je me lance. Je me suis posée devant mon pc, avec la ferme intention de ne pas couper ma connexion avant d'avoir pondu quelque chose qui se tienne un tant soit peu.
Et comme rien n'est venu spontanément, j'ai fait ce qu'on fait dans ces cas-là (moi, en tout cas) : j'ai commencé par écrire "Je sais pas quoi écrire."
J'en ai fait une bonne centaine de lignes avant que mes doigts prennent le contrôle. Avant que mon cerveau stoppe son filtre coléreux. Je ne me relirai pas. je ne sais pas si cela aura un sens pour vous, lecteurs. Ce qui est le cadet de mes soucis, je l'avoue sans problème ! ;))
L'important est que le fil se déroule à nouveau, que l'envie générale réapparaisse.
C'est mon plus gros souci. Avoir de l'envie. Pour autre chose que choper un bouquin et me perdre dedans. Ou pour me rouler en boule et attendre que ça passe. Quoique j'aimerais bien pouvoir nommer autrement ce "ça".
J'appréhendais ce moment, mais je ne me doutais pas que le malaise serait si profond.
Pourtant, je sais très exactement ce qui ne va pas. Je peux le nommer, l'expliquer, l'analyser... (pour les lecteurs paumés, c'est ici que j'ai expliqué) mais je n'arrive pas à avancer plus loin.
Un second deuil. Voilà ce qu'on m'a annoncé.
Ça y ressemble en effet. La douleur en moins.
D'ailleurs, c'est peut-être là que le bât blesse... le manque de douleur liée au deuil me manque, me perturbe. Raisonnablement, je SAIS que c'est un travail que j'ai déjà fait. Seulement, le raisonnable n'a pas sa place ici. Ici, c'est juste question de tripes, de ressenti, de non-dit, de trouille de l'inconnu.
Or, avoir peur de l'inconnu quand on est capable de parfaitement décrire cet inconnu, c'est... troublant.
Et puis, mes soucis de genou n'ont rien arrangé. Ça a considérablement bloqué toute velléité de ma part à faire ce qu'il fallait pour que je ne sombre pas dans cette torpeur énervante. Bah oui, quand on sait qu'on doit se bouger le c... mais qu'on peut pas marcher... ben c'est pas simple. (pour ceux que ça intéresse, mes genoux vont... pas mieux, mais disons que dorénavant, c'est redevenu gérable, j'ai repris le boulot, ça va mieux, vous bilez pas ;) )
Bien sûr, je me suis longuement interrogée sur cette "drôle de coïncidence" (tu la sens, l'ironie, là ?), entre cette nécessité de me bouger moralement, de voir du monde pour surnager, et le fait que ce soit pile poil ce moment-là qu'ont choisi mes genoux pour partir en vrille... Non, c'est p'tet pas anodin.
Ou alors, yen a un là-haut qui se venge singulièrement de ma non-croyance en lui et qui doit bien se marrer à me voir patauger sévère ;)))
en attendant, je survis. Ça va aller mieux maintenant que j'ai le droit de poser le pied par terre, que je peux aller bosser. Ça change les idées, quand on bosse, quand on voit du monde, même quand ce monde, c'est juste les collègues.
Je vais pouvoir aller emmerder mes copines chez elles, aller me faire payer un café odorant et aller me réconforter mon neurone en surchauffe à dire un monceau de conneries plus grosses que moi (et c'est pas peu dire, lol).
Et puis quand j'aurai un peu rechargé mes batteries, je pourrais songer tranquillement à ce qui m'arrive. Sans que ça tourne en boucle... :)