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Les Mots de Pati
5 septembre 2006

septembre...

Je me souviens de ce jour.
Un de ces jours où tout s'est figé en mémoire comme sur une photo. Un de ces jours qui gardent un goût particulier en bouche, même des années après.

Ce jour-là, je bossais. Il faisait si beau. Un magnifique soleil sur fond de ciel azur. Nous étions absorbés par la livraison en temps et en heure d'un avion client. La radio, comme toujours dans ces cas-là, était branchée sur la tour de contrôle de l'aéroport voisin, autant pour connaître le traffic que pour anticiper un éventuel changement de météo.
Vous savez comment c'est, non ? Vous bossez et ce qui passe à la radio est un vague bruit de fond... Mais vous savez qu'il suffit d'une annonce ou d'un son particulier pour que votre attention soit en alerte...

A 14h30 heures, environ, j'entend qu'un de nos avions s'est vu contraint de faire demi-tour... Le pilote est rageur, vu son ton... Cela ne retient pas trop mon attention. Mais vers 15 h, c'est la totalité de nos avions que les Etats-Unis détournent de leur destinations et ils interdisent tout survol de leur territoire... Allons bon ! c'est quoi, encore cette histoire ?
Le temps de mettre la main sur un poste de radio, de trouver une radio d'infos, les langues vont bon train, dans le bureau... "Encore cette fichue parano" dit un collègue, d'un ton blasé...
Il quitte ce ton à l'annonce du flash d'infos. C'est ahurissant ! On a du mal à y croire, c'est trop énorme, même dans un film, ils auraient trouvé ça "trop"...
Dans la demie-heure qui suit, tout se précipite. A l'aéroport, ils sont submergés de demandes de renseignements de personnes qui ont des proches "là-bas". Ils crient à l'aide. Nos chefs nous disent alors que la Direction fait appel à toutes les bonnes volontés, pour aller donner un coup de main.
C'est ça, de bosser dans une compagnie aérienne... Quand un souci pointe son nez, tout le monde est concerné et personne ne rechigne à se retrousser les manches...

Je décide d'y aller. Là-bas, c'est l'enfer. Les comptoirs sont envahis de passagers paniqués. Ils veulent absolument rentrer chez eux et on le leur interdit ! Ils veulent alors téléphoner, mailer, mais tous les réseaux téléphoniques sont saturés ! C'est une panique sans nom. A chaque flash d'infos, encore plus de cris, de larmes, de crises d'angoisse, de gens à rassurer, à calmer, à consoler, à soutenir.
Les rares qui ont pu joindre leurs proches ont une mine hagarde, quand ils raccrochent. Personne n'ose leur demander de nouvelles... pas la peine, tout se lit sur leurs traits...

Je rentre 3 heures plus tard, harassée, usée, peinée, interloquée. Arrivée à la maison, j'allume la télé et d'un coup, tout ce que je n'ai fait qu'entendre devient brutalement vision. Un cauchemard. Mais ça n'a rien d'une fiction. On est en pleine réalité.

wtc_lights


Nous sommes le 11 septembre 2001.

en mémoire aux 2986 victimes du WTC

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Commentaires
P
pivoine, ségo > oui, je me souviens de ces drapeaux, de ces chaines humaines pour la paix, de ma surprise face au "Non" retentissant de Chirac aux Etats-Unis (une des rares décisions qu'il ait prise qui collait à mes convictions profondes...), d'avoir dit à un collègue, le jour-même à l'aéroport que maintenant que Massoud était mort, la guerre aurait sûrement lieu, ma colère aussi, quand on a appris que les autorités américaines, savaient depuis des mois qu'un complot teroriste menaçait leur sol et qu'ils n'ont rien fait pour l'arrêter... à croire qu'ils tenaient là une excuse en béton pour attaquer l'Irak... mon incrédulité à voir Bush et ses consorts braver impunément les lois et envahir un pays sans aucune autorisation de l'ONU... ouais... bad trip, commes ils disent...<br /> <br /> Pierre > oui, ma vision aussi a changé. voir tous ces gens terrassés par un évènement qu'ils pensaient impossible, voir leur désarroi face à cette attaque... combien ils se sentaient au-dessus de tout ça, intouchables. ça m'a mise en colère de voir ce peuple, censé être le plus puissant du monde, aussi désinformé, aussi mis en retrait de la réalité.<br /> et puis aussi, cette solidarité immédiate, tous ces gens qui sont morts en tentant de sauver leur voisin, tous ces pompiers, qui savaient pertinnement avoir peu de chances de survie et qui sont quand même montés dans les étages faire leur devoir... sans un mot de trop.<br /> oui, notre vision du monde a forcement été altérée à jamais, ce jour-là.
P
Zut ! J'avais fait tout un commentaire et j'ai tout perdu ! Pas d'chance.<br /> Ce que je faisais ce jour-là ;-)<br /> Et ce que j'en pensais...<br /> <br /> Ce que je crois surtout utile de rappeler, c'est qu'après cela (et là, je rejoins Ségolène), les USA ont parlé de traquer Ben Laden, qu'on l'a cherché un peu partout, pour finalement, revenir au problème récurrent de l'Irak, et laisser tomber la traque de Ben Laden pour bombarder l'Irak en 2003. <br /> <br /> Tu te souviens de tous les drapeaux pour la paix, Pati? Et maintenant, je crois que le monde n'est pas plus rassuré.
S
Ma toute première phrase a été " mais c'est une déclaration de guerre "...et le monde entier m'est soudainement apparu comme une poudrière...
P
Surprenant de constater combien la mémoire enregistre précisément certains détails...<br /> <br /> Moi je passais la tondeuse, en cette superbe journée au ciel bleu azur. Je ne me souviens pas pourquoi je suis revenu à la maison, peut-être pour boire un coup. La radio était restée allumée. Quand j'ai entendu la voix très connue du directeur de l'info de France-Inter, j'ai compris qu'il se passait quelque chose de suffisamment important pour bloquer les programmes. Pendant quelques secondes j'ai tenté de comprendre l'analyse qui était faite, mais je ne savais pas encore ce qui s'était passé. Dès que j'ai su j'ai bondi pour allumer la télé.<br /> <br /> J'ai vu un crescendo qui mélangeait images rediffusées et images en direct. Avec un coup de massue supplémentaire pour chacune des phases de l'inimaginable. J'en suis "tombé sur le cul", me retrouvant assis par terre, terrassé par ce que je voyais. Complètement hagard. Bouffé, envahi, anéanti.<br /> <br /> J'ai pris cet évènement en pleine gueule, en pleine vie, sachant instantanément que c'était de l'Histoire en direct. Je savais que quelque chose était définitivement changé dans ma perception de l'humanité.<br /> <br /> Dans les jours, semaines, mois qui ont suivi, je suis resté habité par cet évènement, que j'ai absorbé a haute dose. J'avais besoin de voir et revoir, lire, comprendre. Ressentir. Je me suis fait offrir l'épais bouquin de photos publié quelques moins plus tard. Tout cela s'est enfoncé en moi et y est resté.<br /> <br /> Cette date reste marquée dans ma mémoire. C'est probablement l'évènement d'actualité le plus profondément imprégné en moi. Je n'y donne pas le sens de "folie des hommes", mais plus simplement d'une dimension de l'humain que je n'avais pas envisagée. Mes convictions humanistes en ont été fortement affectées. Mais dans l'autre sens c'est aussi la stupeur collective, l'entraide, la solidarité, qui ont touché quelque chose en moi.<br /> <br /> Ces jours-ci je revois des photos de l'évènement apparaitre dans les journaux. Réveil de ce que j'ai ressenti, intact...
P
je me suis rendue compte, après l'envoi de cette entrée, que j'avais oublié d'y marquer :<br /> "et vous, que faisiez-vous ?"<br /> <br /> je vois que ce n'était pas utile :)<br /> vous avez parfaitement compris ce que je voulais en comm'<br /> <br /> pour ça, merci :)
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