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Les Mots de Pati

2 mai 2012

J'ai mal à...

Parce que parfois, il faut rappeler les choses évidentes... parce qu'il faut même les seriner à loisir, pour que personne ne les oublie.
Parce que dans trois jours, nous avons rendez-vous aux urnes, et qu'il ne faudra pas se tromper de bulletin.
Parce qu'enfin, cassy est mon amie et que je soutiens sa démarche...

Je vous invite à aller lire son article, "J'ai mal à la France" et je partage volontiers son hymne et son drapeau, encore valables 3 jours...

 

On la trouvait plutôt jolie, Lily 
Elle arrivait des Somalies Lily 
Dans un bateau plein d'émigrés 
Qui venaient tous de leur plein gré 
Vider les poubelles à Paris 
Elle croyait qu'on était égaux Lily 
Au pays de Voltaire et d'Hugo Lily 
Mais pour Debussy en revanche 
Il faut deux noires pour une blanche 
Ça fait un sacré distinguo 
Elle aimait tant la liberté Lily 
Elle rêvait de fraternité Lily 
Un hôtelier rue Secrétan 
Lui a précisé en arrivant 
Qu'on ne recevait que des Blancs


Elle a déchargé des cageots Lily 
Elle s'est tapé les sales boulots Lily 
Elle crie pour vendre des choux-fleurs 
Dans la rue ses frères de couleur 
L'accompagnent au marteau-piqueur 
Et quand on l'appelait Blanche-Neige Lily 
Elle se laissait plus prendre au piège Lily 
Elle trouvait ça très amusant 
Même s'il fallait serrer les dents 
Ils auraient été trop contents 
Elle aima un beau blond frisé Lily 
Qui était tout prêt à l'épouser Lily 
Mais la belle-famille lui dit nous 
Ne sommes pas racistes pour deux sous 
Mais on veut pas de ça chez nous


Elle a essayé l'Amérique Lily 
Ce grand pays démocratique Lily 
Elle aurait pas cru sans le voir 
Que la couleur du désespoir 
Là-bas aussi ce fût le noir 
Mais dans un meeting à Memphis Lily 
Elle a vu Angela Davis Lily 
Qui lui dit viens ma petite sœur 
En s'unissant on a moins peur 
Des loups qui guettent le trappeur 
Et c'est pour conjurer sa peur Lily 
Qu'elle lève aussi un poing rageur Lily 
Au milieu de tous ces gugus 
Qui foutent le feu aux autobus 
Interdits aux gens de couleur


Mais dans ton combat quotidien Lily 
Tu connaîtras un type bien Lily 
Et l'enfant qui naîtra un jour 
Aura la couleur de l'amour 
Contre laquelle on ne peut rien 
On la trouvait plutôt jolie, Lily 
Elle arrivait des Somalies Lily 
Dans un bateau plein d'émigrés 
Qui venaient tous de leur plein gré 
Vider les poubelles à Paris.

(Pierre Perret)

Sans titre 13

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27 avril 2012

Une main tendue

Elle est installée dans son salon, le portable coincé sur ses genoux. Le vent siffle au travers des volets, les fait vibrer contre la vitre. Dehors, la tempête fait rage, les branches du cèdre cognent contre la pergola, qui gémit sous ces assauts brusques et saccadés.
Elle sirote son café. Elle se dit qu'elle est bien, là, blottie au fond de son fauteuil, bien au chaud, à écouter les éléments se déchaîner autour de sa maison. Ses doigts courent sur le clavier, ils ont cette espèce d'autonomie que la rêverie inspire. 
Elle aime la nuit. Elle aime être seule à veiller, la seule à vibrer pendant que ses tendres dorment du sommeil du juste. L'impression que dans cet espace-temps singulier, tout peut arriver, tout est possible. L'impression aussi de grignoter quelques heures à une vie qui s'écoule bien trop vite. Du temps rien qu'à elle, qu'elle savoure seconde après seconde...

On frappe à sa porte. Elle sursaute si violemment que le café se renverse, et son cœur jusque-là si paisible s'emballe et cogne douloureusement contre sa cage thoracique. Elle jette un œil sur l'horloge... deux heures moins le quart. Qui donc peut bien la visiter à une heure si tardive ? Les coups se répètent contre le bois, l'inconnu insiste. Elle se lève, vaguement inquiète, mais surtout curieuse, allume la lanterne extérieure et voit une silhouette se dessiner derrière la vitre cathédrale de sa porte d'entrée.
— Pia ? C'est moi, ouvre !
La voix lui semble familière, mais quelque chose la retient, il y a quelque chose qui cloche, dans cette voix qui dit son prénom, là, à cet instant précis. Comme une incohérence... Elle est soudain bloquée, devant cette porte qu'elle ne veut plus ouvrir.
— Ouvre-moi, pia, je t'en prie...
Sa main bouge, se tend vers la poignée. Non ! Elle ne veut pas, mais sa main ne lui obéit pas, elle ne contrôle plus son mouvement. Et c'est avec un cri ravalé qu'elle voit sa main ouvrir la porte.
Elle a peur, d'un coup. Elle ne veut pas voir qui se tient devant elle, elle refuse de lever les yeux vers cette voix venue de si loin... mais comment résister, la prière dans cette main tendue vers elle est trop pressante, trop... tendre.
Quand elle ose enfin un regard, deux yeux noirs la happent, et d'un seul coup, plus rien n'existe que ce regard qui la mange toute entière, et elle se laisse entraîner au fond de ce gouffre d'amour, elle y plonge avec un désespoir et un désir qui lui font peur.
Il n'a pas changé ou si peu... ses longs cheveux bruns entourent son visage aux traits irréguliers, sa peau mate invite à la caresse, sa bouche se plisse en un sourire charmeur, ce sourire qui l'a toujours fait fondre, auquel elle n'a jamais eu la force de résister.
Ils ne se parlent pas, à quoi bon. Les mots n'ont aucune importance, leurs yeux se racontent tout ce qui importe. Il tend toujours la main vers elle, il attend.
Alors, sans un regard en arrière, elle s'agrippe à cette main tendue et le suit dans la nuit sans étoile et sous les bourrasques d'un vent de printemps qu'elle ne sent plus. 

Elle se réveille en sursaut. Elle est toujours avachie dans son fauteuil, l'ordinateur penche dangereusement sur ses genoux. Elle le pose sur la table basse et veut se lever. Ses pieds nus rencontrent une flaque poisseuse... son café renversé. Un rêve... elle a juste rêvé...

Alors, dans la solitude d'une nuit ordinaire, elle se met à pleurer.

 
26 mars 2012

Sans retenue ni contrainte...

Ma fille,

Je ne suis pas ta mère, tu n'es pas ma fille. J'ai toujours rêvé d'avoir des filles. J'en voulais trois, j'ai eu trois fils. Trois fils que j'aime de toute mon âme. 
Mais pas de fille. Impossible de poursuivre cette transmission familiale purement féminine qui a tant compté dans ma vie. Impossible, croyais-je... je me trompais évidemment. J'ai transmis ce que je sais à mes fils, ils l'ont perçu comme un don précieux, enfin je le crois... mais ce n'était pas tout à fait pareil. Et puis tu es arrivée dans ma vie.

Dès nos premiers échanges, j'ai reconnu chez toi mes errements, mes failles, tu as trouvé chez moi une preuve que malgré les coups bas, on peut se relever de tout, ou presque. Tu as tracé ta route vers mon coeur et tu t'y es installée. Je suis devenue la mère dont tu avais besoin, tu es devenue la fille que j'attendais.

Je t'ai accompagnée dans ta longue traversée d'un désert affectif que tu exécrais, je t'ai vue grandir, prendre confiance, puis douter et enfin oser, oser vivre. Tu m'as offert ta présence, ton amitié, ton amour. Tu m'as menti aussi, mais tu as fait preuve d'un tel courage pour me l'avouer ! Tu avais tellement peur de me perdre... comment aurais-tu pu me perdre, en acceptant de te montrer dans toute ta vérité, même si cette dernière était inconfortable ? Je t'ai vue peu à peu assumer la femme que tu es, et je t'ai vue devenir mère à ton tour, d'une fille, évidemment...

Cela fait bien des années maintenant que nos routes cheminent côte à côte. Nos pas s'éloignent parfois, mais le lien perdure. Nous sommes présentes l'une pour l'autre, nous le savons sans le dire. C'est tellement évident. Et pourtant...
Pourtant, c'est tellement mieux de le dire. De dire à quel point je t'aime, à quel point tu comptes pour moi. Te l'ai-je dit suffisamment ? Oui, tu le sais, mais l'entendre, c'est tellement important, fille. Alors je t'écris ce soir, pour te le dire. Je t'aime. 
Tu traverses la vie comme tu peux, tu te bats contre tes démons, je sais que tu veux les combattre seule, sans que je sois forcément là pour te rattraper au vol, j'ai accepté ce fait, je l'ai même encouragé. J'ai, de mon coté, traversé quelques épreuves, de celles qui te bouffent l'énergie nécessaire pour rester ouverte aux autres... je n'ai rien vu venir. J'ai bien senti que tu n'allais pas bien... tes silences en ont toujours dit beaucoup à mon coeur. Mais j'ai pensé que tu saurais traverser cette phase délicate sans béquille, ce qui n'était pas mon cas. 
Je me suis trompée. Il y a eu des signes, je les ai vus. Je les ai mal interprétés, ça arrive parfois. Même les mères se trompent. Surtout les mères.

Mais peu importe. Ce qui compte aujourd'hui, c'est ta main à nouveau tendue. C'est ton appel à l'aide. Et bien sur que je vais attraper ta main, bien sur que je t'entends. Je suis là, à tes côtés. Je serai toujours là, fille, quoiqu'il se passe, quoiqu'il arrive. Ne compte pas te débarrasser de moi comme ça. Je ne te lâcherai pas, pas tant que tu ne tiendras pas seule debout. Et même après, je serai encore là. Je serai toujours là pour toi.

Parce que je t'aime. Je t'aime comme une mère aime sa fille, comme ma mère m'aimait, sans retenue ni contrainte, je t'aime telle que tu es et telle que tu deviendras. 
Tu n'es pas de mon sang, non. Mais tu es de tout le restant de moi. De mes tripes à mon âme, de mon coeur à mes bras qui t'enlacent, à mes mains qui t'étreignent. Je t'aime, ma fille. Je suis si fière de toi... ne l'oublie pas.


Pour kaléidoplumes

25 mars 2012

Sous une lune opale

J'aurais aimé me fondre dans la beauté de l'onde
ne plus penser à rien et me couper du monde

J'aurais aimé voler au gré d'un vent d'été
toucher la cîme des arbres et ne plus retomber

J'aurais aimé teinter mon âme de bleu
la tête dans les nuages et le coeur amoureux

J'aurais aimé collectionner les bulles légères
de petits bonheurs simples emplir mon éphémère

J'aurais aimé apprendre sans avoir à souffrir
mais j'aime avoir appris que de tout on peut rire

J'aurais aimé te dire à quel point je t'aimais
le dire et le redire, pour ne rien regretter

J'aurais aimé mourir sous une lune opale
et le corps apaisé, m'offrir un dernier râle.

Pour kaléidoplumes

24 mars 2012

En un mot comme en cent...

Âme, Autrement, caractère, chez, confier, histoire, naturel, penchant, songe, transports
Tels sont les dix mots sélectionnés cette année par les partenaires francophones de la semaine de la langue française en France, Suisse, Québec et Belgique.

Lancée en 1995, la grand-messe de la francophonie démarre ce samedi 17 mars et se poursuivra jusqu'au dimanche 25 mars prochain.

A l'occasion de cette édition 2O12, c'est donc le thème de l'expression personnelle qui a été mis à l'honneur.
Dis-moi 1O mots qui te racontent"entend ainsi mettre en exergue les richesses lexicales de la langue française.

Voici, pour kaléidoplumes, ma participation :

 
On dit de moi que j'ai du caractère
Que je ne sais de ma colère
Gérer l'impétueux transport
On n'a pas tort...

C'est chez moi un penchant naturel
Comme d'autres ont celui du fiel
J'ai cultivé l'art de ne rien réfréner
De ce qui pourrait envahir mes pensées

Les assombrir ou les polluer
Les malmener, les contenir
Les enchaîner ou les meurtrir
Les rendre lisses, préfabriquées.

J'ai l'âme rebelle et volontaire
De ceux qui rêvent autrement
J'ai bataillé, pour toute entière
M'accommoder de mes tourments 

Mon caractère est le reflet
De mon histoire, ma construction
Il est entier, sans concession
Mais grâce à lui, je reste vraie.

Je ne veux plus d'un songe éthéré
Ma vision du monde envelopper
Je veux ancrer mes pas dans la réalité
Tant pis pour le confort de la civilité.

J'aurais pu de mon âme bien des choses vous confier
Mes angoisses, mes failles, mes moments de faiblesse
Mes rires, mes larmes, mes élans de tendresse
Mais je me dois d'être sincère, ce n'est pas un secret

Je suis comme je suis
Je suis soupe au lait.
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24 mars 2012

hum...

ça sent la poussière, ici...
voilà des semaines que je n'ai rien posté. prise pas d'autres écrits, ou d'autres soucis... la vie, quoi.

je n'ai pas pris le temps de poser sur mon blog mes états d'âme, pourtant en nombre, ces derniers temps est-ce un signe de désintérêt ? non, même pas... la flemme, pour être honnête ;)

peut-être aussi que je n'avais pas envie de me morfondre, de ressasser mes idées noires... ou de les partager. envie de me les garder pour moi, pour une fois ^^

ya pas eu que du sombre non plus. ya eu des rencontres, aussi. de belles rencontres, de celles qui prennent du temps, aussi, forcément, puisqu'elles sont belles, on en profite.

et puis, l'écriture d'un nouveau roman, évidemment. une écriture qui coule moins de source, mais qui fascine toujours autant... il faut juste trouver ses marques dans une nouvelle histoire, apprendre à lier connaissance avec de nouveaux personnages, se familiariser avec un nouveau décor. c'est toujours beaucoup de travail, mais c'est tellement passionnant ! et j'avoue apprécier que cette aventure-là soit plus posée, moins dans l'urgence que l'écriture de haize...j'ai l'impression de prendre mon temps, parce que je l'ai, le temps. c'est un luxe inoui...

d'autres aventures de plume se profilent à l'horizon... quelque chose d'inattendu, de magique. une commande pour des amis cinéastes... de quoi rêver à plein tube ;)

mais bon, ce n'est pas une raison pour laisser mon cahier de brouillon à l'abandon ^^

23 novembre 2011

instantanés mémoriels et sensitifs

Mon genou. Une énième opération, une énième hospitalisation. Et la douleur, bien sûr.

Les premiers jours, elle est omniprésente. Elle bouffe chaque minute de mes journées, et surtout de mes nuits. Malgré la morphine, malgré un cathéter d'anti-douleur en prime... ce n'est pas une douleur extrêmement violente, mais plutôt de ces douleurs qui sapent par leur continuité. Une sorte de fond ambiant, qui colore tout de rouge.
Je ne sais pas pourquoi j'associe le rouge à cette sensation. Le noir n'irait pas, trop sombre, trop en retrait de la vie. Le gris... trop terne. Alors le rouge. Un rouge vif, plutôt clair, un rouge vie.
Non, je ne pense pas au rouge sang. Malgré le fait que la douleur pulse en rythme, comme un pouls supplémentaire, en léger désaccord avec les battements du cœur. Est-ce ce léger tempo d'écart, qui rend la pulsation si insupportable ? Possible.

Au début, je laisse passer l'orage. Je rentre la tête en dedans, je joue l'autruche civilisée. Oui, tu viens me voir, tu me parles, tu me demandes si j'ai bien dormi. Et j'écoute, et je réponds, la réponse en elle-même n'a pas grande importance, mais le lien social, oui. Une façon comme une autre de ne pas se laisser submerger par la lame de fond, ne pas se laisser entrainer trop loin. Peur de ne pas être capable d'en revenir ? Possible oui. Une douleur légère mais continuelle est quelque chose de très déstabilisant à vivre. Et comme elle n'a pas de fin, il est assez compliqué de se motiver à la supporter encore un peu.
Malgré tout, des progrès. Je me lève, je fais quelques pas. Douleur encore, mais au moins, je sais pourquoi, je sais comment, c'est moi qui la rend plus forte, puisque je fais un effort physique, concret. Drôle d'alchimie que le cerveau, qui préfère une douleur plus vive, si tant est qu'il sache qu'il est possible de l'arrêter...

Jour après jour, la douleur est moindre. Elle me laisse du répit, j'ai quelques heures régulières de sommeil réparateur, la marche est plus aisée, et surtout, mon neurone se met parfois en mode vacances, libéré de son entrave sensorielle. Il est temps de quitter la clinique pour entrer au centre de rééducation.
J'attendais ce moment pour retrouver ma plume. Car il m'était impossible de me concentrer sur un texte, tant que cette lame de fond restait constante et fortement présente. Pour me frotter aux consignes, intéressantes et porteuses. 
Pour ce nouveau roman dans lequel nous sommes en train de plonger. Le sujet de notre nouvelle aventure à quatre mains est trouvé, le lieu est choisi, reste le plan à faire... j'ai essayé mais non. Rien de bon ne vient.

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Et je me retrouve ici. 6 ans après. « Viry-Châtillon, ça sonne comme une station balnéaire. Quelques arbres égarés entre deux autoroutes... » j'ai retrouvé cette phrase sur mon blog. Elle est d'un copain de galère, rencontré au moulin.
J'aime cette phrase. Non pas qu'elle soit criante de vérité (Viry-Châtillon n'a rien d'une station balnéaire), et pourtant, c'est tout à fait l'impression qui nous gagne, quand on est pensionnaire du Moulin de Viry.
Une halte hors temps, hors quotidien, rythmée par des heures de kiné, des repas pris au réfectoire, on se croirait presque dans une pension de vacances.

J'occupe la chambre située juste au-dessous de la tienne. Quand je sors fumer, je n'ai qu'à lever les yeux, et j'ai l'impression que tu vas surgir, accoudé au balcon, me regardant avec au fond des yeux ce mélange de malice et de gravité qui te caractérisait si bien.

Je renoue avec des automatismes oubliés, c'est d'une facilité déconcertante. Parfois, les images d'hier viennent en surimpression sur celles d'aujourd'hui. Un éclat de rire résonne et je me tourne, surprise, pour ne voir que ma mémoire qui frémit en ces lieux retrouvés.
J'ai retrouvé « mon » kiné, mon sauveur, celui qui m'a fait marcher droit. Je vois dans ses yeux la même réminiscence, le même écho, et ses yeux et les miens s'embuent sans que l'on lutte le moins du monde.

La douleur, au fil des jours, s'apaise, s'affine. Elle devient souterraine, joue sa ronde en sourdine. Parfois, agacée de se voir oubliée, elle se rappelle à moi de façon brutale, presque grossière. Ne m'oublie pas si vite, je suis toujours là. Je ne risque pas de t'oublier, ce serait plutôt l'inverse, tu fais partie de moi depuis si longtemps que tu es devenue comme un organe à part entière, une sorte d'excroissance adoptée qui a fini par me définir aussi bien que mes autres traits de caractère.
Mais je ne veux plus de toi, et les exercices répétés en salle de kiné te gomment petit à petit de mon existence.
Je sais que tu vas me manquer, aussi étrange que cela puisse paraître. Je sais que je vais passer de longs mois à chercher, à palper mes poches, mon sac, à réfléchir à ce que j'oublie, et qu'invariablement, je me souviendrai que c'est juste ton absence qui ne cesse de m'épater. Mais je n'en suis pas encore là.

Je suis restée cinq semaines à Viry. La veille de mon départ, j'ai dit au revoir à mon kiné, ai pris ses coordonnées personnelles car je sais que j'aurai besoin de ses aptitudes professionnelles encore longtemps. Et j'ai dit adieu à tout le reste. J'ai très mal dormi, pour cette dernière nuit passée en ces lieux. Je n'y reviendrai plus, je le sais, et c'est une page qui se tourne.
J'ai tant de souvenirs ici. En si peu de temps, finalement (12 semaines de ma vie, c'est si peu) j'ai engrangé là des émotions si fortes, si prégnantes qu'elles m'accompagnent à chaque instant de ma vie.

Je me souviens de toi, Tophe, de ton sourire et de la discrétion avec laquelle tu as quitté ce monde, attendant d'être seul au moulin pour tirer une dernière révérence. Repose en paix, mon ami, ton souvenir accompagne chacun de mes pas nouveaux, j'ai bizarrement associé une marche équilibrée au souvenir du froissement discret des roues de ton fauteuil dans les couloir du centre...

Je me souviens de toi, papa, qui marchait derrière moi en pleurant car tu ne m'avais jamais vue marcher sans boiter. Je suis si heureuse que tu aies pu assister à ce petit miracle avant de t'éteindre. J'aurais tellement aimé te donner à lire ce roman écrit avec mon écho des montagnes ! Comme tu aurais aimé cette histoire, comme tu aurais été fier de voir que ta fille vivais pleinement sa passion des mots... 
Dans trente-deux jours, je ferai une énorme entorse à mes vieilles habitudes, j'oublierai un instant mes vieux démons et j'irai me recueillir sur votre tombe, à toi et à maman. Je m'y rendrai sans canne ni béquille, je marcherai droite, je ferai très attention à ne pas boiter, je vous parlerai de Loan, le fils de mon fils qui est né le 18 octobre, que je n'ai pas encore vu et que j'aime déjà, je penserai à tous ces moments de bonheur intense que nous avons partagé, et je vous dirai adieu, seule face à la stèle. Je pleurerai surement, mais je sais que ces larmes seront douces, apaisantes, sereines. J'ai tourné une page de ma vie. Que dis-je, un tome entier s'efface lentement. Je ne sais pas de quoi sera constitué le suivant. Peu importe, je n'ai pas envie de savoir.
Je sais que je le vivrai intensément, en tâchant d'en savourer le goût vif seconde après seconde. Et je m'abreuverai à la source de vie jusqu'à plus soif.

7 novembre 2011

et l’enfant quitte son nid

Il y a quelques temps, je vous parlais de cette incroyable aventure, l’écriture à quatre mains d’un roman, avec la complicité de mon amie Cassymary. Nous avions espéré mettre moins d’un an à l’écrire, pari largement tenu ! L’enfant, un joli prématuré de huit mois, est enfin né cet été. Courant juillet, il a reçu son habit de fête, une belle couverture fabriquée comme lui, à plusieurs mains.
Le 20 septembre 2011, il entrait officiellement dans le monde, sur le site professionnel de Cassy, afin d’y trouver ses futurs parents : des lecteurs, que nous espérions nombreux, et aussi enthousiastes que nous, à la découverte de cette belle histoire.

Un peu plus d’un mois a passé. Nous avons reçu les premiers retours de lecture. Quel choc, quelle belle surprise de se rendre compte que ce livre où nous avons mis tout notre cœur, toute notre âme, a été non seulement apprécié, mais plus encore : il a été compris, ressenti, et transmis. Nombre de nos lecteurs ont en effet donné “Haïze Hegoa” à lire à leurs proches, leurs amis… j’aime beaucoup cette transmission de nos mots, de plume à œil, puis de bouche à oreille… j’aime que nos mots entremêlés voyagent d’un lecteur à l’autre, j’aime voir grandir ce bébé que nous avons chouchouté de longs mois, j’aime le voir prendre son envol.

haize_hegoa

“Haïze Hegoa” est une histoire d’amour. L’amour d’une région, des montagnes, des gens simples et vrais qui y habitent. C’est aussi une histoire d’amitié, entre Louise et Ninon, que nous suivons des années 30 jusqu’en 1994. C’est aussi une quête identitaire, pour un jeune homme qui va comprendre en quelques jours qui il est et d’où il vient. Enfin, c’est un cri d’espoir. L’espoir en la vie, sa richesse et sa force. Une vie capable de renaitre de ses cendres. Les ruines ne meurent pas ; elles nous attendent. Et il suffit parfois que souffle le vent du sud, pour les sortir de leur sommeil.

Voici quelques extraits des messages reçus en retour de lecture. Ils expriment bien mieux que je ne saurais le faire ce qu’ont pensé les nouveaux parents de notre bébé ;) :

  • Une envie, le relire... ! Comment dire ça ? Il touche à tellement de choses, à l'amitié indéfectible, à la chance d'avoir ou non une famille, à la guerre, à la paix, à l'horreur et puis à l'espérance [….] à vous lire, on se demande qui a écrit quoi, tellement tout se tient et semble couler d'une seule et même plume…
  • je suis impressionnée par le résultat de votre roman à quatre mains! L'intérêt reste constant, les techniques utilisées (...) sont pertinentes, l'histoire de cette belle amitié, que l'on ne peut s'empêcher de relier à votre belle amitié à vous deux, est très touchante, l'époque choisie, les évènements, les lieux....tout est empreint d'une force qui se partage à la lecture.
  • Votre livre m’a tenue en haleine de bout en bout et je l’ai beaucoup aimé.[….] J’ai aimé le personnage très attachant de Sam qui s’approprie peu à peu sa propre histoire. Il est une sorte de trait d’union, de lien, entre passé, présent et avenir.[….] J‘admire la façon dont vous avez réussi à travers une construction très originale à garder une unité de ton malgré vos « quatre mains », signe sans doute d’une grande complicité et d’une profonde amitié."
  • Je ne sais pas qui a écrit quoi, mais je m’en fiche, j’ai dévoré de bout en bout ![….] chaque fin de partie donne envie de tourner la page, sans attendre, on brule  de connaitre la suite de l’histoire !

Pour commander ce livre, cliquez sur l’image ci-dessous, et laissez-vous guider, ou bien laissez un commentaire sous cet article :))

12 septembre 2011

La veuve qui passe

Au seuil de la mort, je te tutoie enfin, toi qui habite mon corps, fait trembler mes mains, toi qui laboure ma chair de tes griffes de feu. Compagne de mes nuits, de mes jours, de toute ma vie... ma douleur, ma sœur de peine et de chagrin.

femme_crete

Mon homme est parti depuis si longtemps, j'ai oublié le goût de ses mains sur ma peau lisse et tendre. J'ai oublié mon âme en route, mon coeur s'est durci, ma peau s'est flétrie, mes cheveux ont blanchi. Je traverse la vie comme une ombre invisible, une silhouette noire, difforme et solitaire, qui se meut avec peine, appuyée sur une canne bien plus droite que moi. Je porte mon deuil comme d'autres se fardent, je suis la veuve qui passe et pleure sa misère au moindre de ses pas. 

J'arpente de plus en plus lentement cette route écrasée de soleil, l'habitude est si grande qu'on ne me remarque plus, sauf peut-être à se dire « tiens, la veuve est là, il est temps de chauffer le repas ».

Longtemps j'ai lutté contre toi, j'ai cru te vaincre bien des fois, je me suis arrimée à la vie, aux habitudes ronronnantes d'une monotonie tranquille. Chaque jour, j'ai suivi le chemin qui mène au cimetière, le corps en lutte, le coeur en feu. Pour rien au monde, je n'aurais rebroussé chemin, puisqu'il me menait à mon homme, à mon ancre perdue. Et chaque jour, j'ai maudit ta violence, j'ai bataillé ferme et pesté contre toi, qui me menait la vie si dure...

Ce n'est qu'à l'aube de mon dernier jour que je comprends que c'est toi, ma vieille ennemie, toi ma douleur qui m'a fait me sentir en vie. Tu m'as offert ce dont j'avais besoin, un exutoire à ma peine, un but à atteindre, quelque chose à haïr d'autre que moi-même. Ma douleur, mon amie...

Quelle folie, mon dieu, quelles futiles guerres que celles qu'on ne gagne qu'à jamais endormi.
 
Pour kaléïdoplumes 
photo de madeleinedeproust 
9 septembre 2011

Farniente

12 ans. Ça faisait 12 ans que nous n'étions pas partis en vacances.
La maison à rembourser, les enfants, les aléas de la vie... 12 ans sans partir se ressourcer,
même un peu, même pas très loin... quel manque !

Et quel plaisir de partir ne serait-ce qu'une semaine !
 

     Photo de Mathieu Normant

vautour_fauve03_beon_06Sans compter que je partais dans les Pyrénnées, dans la si belle vallée d'Ossau !
Nous avons pris un gite en pleine montagne, dans un petit hameau désert...
pas un bruit, si ce n'est les sifflements rauques des faucons fauves poussant leurs petits à quitter le nid.

Leur vol majestueux sur le bleu d'un ciel vierge de tout nuage a quelque chose d'envoutant, et de très reposant.

Chaque matin pendant une semaine, j'ai ouvert les volets pour contempler un panorama somptueux, une carte postale magnifique et changeante, parfois écrasée de soleil, parfois noyée dans les nuages vaporeux, c'était toujours un régal pour l'oeil.

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SAM_0950

Et puis à la fin de la semaine de congés, mon très cher est parti avec fiston chez des amis, tandis que je rejoignais Cassy, afin de terminer notre roman. Nos retrouvailles, nous les avons fêtées dans le plus beau panorama du monde, le col du Pourtalet et son splendide Pic d'Ossau.

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Nous nous sommes posées en pleine nature, pour renouer le lien, pour casser une petite croûte, mais surtout pour profiter de ce grand moment de bonheur. Nous étions tellement en osmose avec notre environnement qu'un papillon a fait halte près de nous.

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De retour chez cassy, j'ai pu faire connaissance avec sa soeur, notre lectrice correctrice attitrée. Je l'ai aimée au premier regard. Très différentes et pourtant si semblables... nous l'avons emmenée là où nos coeurs battent depuis près d'un an, au coeur de ce hameau accroché à la roche, qui sert d'écrin à notre roman. Je l'ai vue arpenter le chemin avec émotion, comme nous avions vibré de concert, cassy et moi, quand je m'y étais rendue pour la première fois. Sensation d'être privilégiées,  de vivre là un vrai moment d'intense plaisir et de partage.

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Et puis, nous avons apposé la dernière touche à Haïze Hegoa, toutes les trois ensemble. Un point d'orgue à la hauteur de l'évènement. Cette photo-là, vous la découvrirez bientôt, c'est la couverture de notre livre...

Pour ma part, je conserverai de cette semaine de vacances une sensation, une image unique. Je pense que nous pouvons dorénavant l'appeler "notre" banc.

SAM_0968 

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